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9 juin 2010 3 09 /06 /juin /2010 18:03

 

La suite tant attendue (mais par qui, c’est une autre histoire) d’un de mes premiers billets sur ce blog. Résumons donc cet illustre billet. L’auteur (c’est moi, mais c’est pour faire comme les vrais critiques, ils commencent souvent leurs textes par l’auteur), l’auteur donc (vous-ai-je déjà dit que c’était moi ? Oui ? Ah bon…) l’auteur donc, y décrivait un peu son parcours dans le domaine du goût et du vin.

liquoreux 1

Il nous disait son émoi devant la complication et un certain snobisme du monde vinique. Dans une envolée lyrique très ébouriffante, il nous parlait pêle-mêle de son père, de tripes à la corse, de minéralité, d’Anne-Claude Leflaive, de Papouasie, de son médecin de famille et même du fait, pourtant improbable, que Dieu le tarlatutte. Bref, envolée, oui, mais pour un atterrissage (quel laid mot !) un peu abrupt. En fait un peu le bordel ce texte, c’est à se demander si l’auteur n’est pas un peu con…

Ah ! désolé, j’avais oublié qu’en citant « l’auteur », je parlais de moi en fait. Bref, toute une longue tartine pour terminer par un « mes goûts sont simples, je me contente de ce qui me plaît », lamentable de platitude.

On aurait pu en rester là, mais non, il fallait que l’auteur remette le couvert, tant en lui est patent le conflit entre son amour pour le vin  et d’autre part ses origines roturières et, pour tout dire, limite néanderthaliennes.

Comme je (on va reprendre la première personne du singulier pour parler de moi parce que je risquerais de dire du mal dans mon dos et mon front me gratte, une couronne de lauriers y poussant), comme je… comme je quoi ? Je ne sais plus, ça m’apprendra à tenir des digressions futiles, mais d’un autre côté, c’est rare de voir un trou de mémoire sur un blog non ?

Ah oui, comme je ne suis pas du genre à m’allonger sur un divan, seul en tout cas, pour parler de mes problèmes refoulés à un drôle de type qui a sans doute plus besoin de son divan que moi, ben j’écris sur mon blog, à propos du conflit patent en moi (et s’il n’est pas tant en moi, c’est que c’est de la faute aux autres), si vous me suivez toujours (moi j’ai du mal).

Alors voilà, je m’interroge. Et j’ai du mal à retranscrire ces interrogations tant j’ai du mal à y voir un début un milieu une fin.

 

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"Les producteurs de foie gras du Sud-Ouest font face à l'administration tentaculaire" extrait du colloque sur les circuits courts de distribution, Islamabad, 2009.

 

Et pourtant… mon amour du vin n’est que le sommet de mon attrait plus vaste encore pour le terroir et ses produits. Par là je parle de toutes ces choses , ces gens, ces accents chantant qui ont la gueule de l’endroit qui les a vu naitre.

Quand je vous parle de pinard, de foie gras, d’agneau des prés salés ou plus modestement des légumes de mon jardin, je ne vous cause pas seulement de mon ventre, bande de boyards, mais d’une putain de vision du monde.

Je rêve d’un monde où les vins pas chers auraient leur succès et leurs lettres de noblesses, d’un monde où même Germaine la smicarde pourraient se payer des produits de qualité avec du goût, d’un monde ou le luxe de bien manger ne serait plus réservé aux gens ayant à la fois des entrées, du fric et de la culture. Je rêve d’un monde où le bon vivre, le bien être, la nonchalance, le temps pris à la vie qui passe trop vite seraient des valeurs valorisées. Non seulement les gens en auraient les moyens mais aussi l’envie. Bon c’est pas gagné.

Oh là l’autre hé, comme il s’emballe comme le fier destrier que tout âne croit être !

Mais oui une vision du monde ! Un combat, une croisade même. Bon, ici, on va perdre des lecteurs parce que si vous vous attendiez à une grande lutte du bien (les ch’tis producteurs du terroir en béret qui produisent du bon naturel) contre le mal (les affreux agro-industriels et les grands distributeurs) vous avez tout faux.

Les belligérants sont bien plus nombreux que ça. En vrac, sans ordre d’importance et de façon non exhaustive (Austin) on peut citer : les hygiénistes de tout poil, les producteurs modestes, les producteurs "d’une certaine importance", l’industrie agro-alimentaire, les grands distributeurs, les centrales d’achats, les écologistes, les altermondialistes, les amis des animaux, les végétaliens qui voudraient qu’on ne mange plus les vaches (les pauvres), ne sachant pas que si on ne mangeait plus les vaches, il y en a beaucoup qui n’existeraient plus, les amateurs élitistes, les gens qui s’en foutent de bien manger ou de manger tout court, eux ils se nourrissent, les riches, les pauvres, et tous les autres, y compris le lobby des hockeyeurs unijambistes guatémaltèques témoins de Jéhovah, peu nombreux mais très influents…

Par contre l’enjeu du combat est assez simple. Simple mais primordial. D’un côté il y a une tendance à la déshumanisation, de l’autre un recentrage sur l’humain.

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La déshumanisation : l’irresponsabilité individuelle, on vous dit ce qui est bon, ce qui est mauvais. On vous dit quoi penser et mieux, on pense à tout pour vous. On vous vend, le samedi à Cora, de la bouffe faite on ne sait où par on ne sait qui on ne sait comment, mais z’inquiétez pas, l’état veille. Et puis il y a une marque, gage de qualité qui vous prouve que vous pouvez y aller en sécurité, d’ailleurs on le dit sans cesse pendant les pubs au milieu de l’émission à Dechavanne ou entre deux mises sur la gueule entre Zemmour et le reste de la France qui dit qu’elle pense. De toute façon on vous prend pour un con, un veau moyennement aisé ou carrément pauvre et même riche on finira bien par vous avoir. On va pas passer son temps à vous expliquer des trucs, parce que vous êtes des abrutis, que vous allez oublier tous vos malheurs pendant quelques semaines grâce à l’Afrique du Sud. Ben oui, parce que comme des cons, vous oubliez le monde réel, les univers de la wii, des sites de socialisation, des écrans plats géants et du blue-ray sans oublier la pléthore de chaines diffusant de la merde facile à penser, vous suffisent bien. Comme des cons aussi vous avez votre bête pavillon en banlieue, avec vos loisirs à la con, votre pelouse impeccable et vos clôtures en bêton . Heureusement qu’il y a le round-up pour faciliter la vie des braves banlieusards. Bientôt d’ailleurs, dans ce scénario là, tout le monde sera tellement abruti et mené par le bout du nez qu’on vous convaincra que la croissance à tout prix, la mort des productions non industrielles qui vendent leurs produits sous le prix de revient, l’importance de l’économie financière sur celle de production, la loi de l'offre et de la demande, le fait de ne boire que de l’eau, de ne pas manger gras et bientôt de ne même plus pouvoir planter ce qu’on veut dans son jardin est NORMAL. Circulez, y a rien à voir.

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Le recentrage sur l’humain : et sur nos racines, nos terroirs, nos pairs, nos voisins. Le responsabilité individuelle. On vous informe, VOUS faites le choix et s’il est mauvais, ben on sera là pour rattraper le coup mais pas à l’infini (vous construisez dans une zone inondable, c’est à vos risques, pas à ceux de la collectivité). Vous voulez vous taper une chope, allez-y donc, manger un camembert au lait cru ou même en produire un ? Allez-y donc. On parle là d’un monde d’utopie, un monde où les Français et les Belges sauraient qu’ils ne sont pas Américains, qu’ils ont des traditions à eux dont ils peuvent être aussi fier que du hamburger et d’Halloween, qu’ils ont derrière eux une culture multi-millénaire et qu’ils ne doivent pas faire caca dans leur culotte quand ils voient une femme voilée, parce que nos valeurs valent bien les leurs et les leurs les nôtres et qu’on gagne plus à apprendre et à s’enrichir des différences qu’à les craindre. Dans cette optique là, les gens seraient un peu plus concernés, auraient des culs plus mobiles. Un contact direct avec ceux qui produisent notre nourriture et entretiennent nos paysages aurait lieu. Les producteurs vendraient directement leurs produits de qualité, produits avec moins d’intrants de toutes les couleurs en faisant, miracle, un bénéfice ! Il y aurait des choses assez étranges dans ce monde là : les gens recommenceraient à faire un potager, à réfléchir à leurs actes quand ils achètent des tomates en plein hiver, des kiwis de nouvelle Zélande, des pommes venues par avion en plein été. Ils redécouvriraient le vrai goût des choses, le plaisir de choses simples et peu coûteuses et du coup auraient plus d’argent pour acheter des produits de qualité. Les gens mangeraient et ne se contenteraient pas de se nourrir. Hé, peut-être même que certains seraient bien dans leur peau, heureux même ?

Bah, oui, utopie à deux balles, pour bobo mal dans sa peau ? Peut-être. Mais peut-être aussi qu’il est autorisé de réfléchir, d’imaginer des solutions, quelque part entre ces deux extrêmes. Des clients, des consommateurs, des producteurs y croient.

Il y a du pain plein la planche. Tant mieux, ça me fera des billets. Aussi pendant l’été qui vient je vous proposerai une série de billets traitant de ces deux mondes là, du point de vue des producteurs de produits du terroir (pas exclusivement de vin) et des consommateurs de ces produits là. Est-ce possible d’en vivre ? Est-ce faisable d’acheter ? Peut-on en faire un débouché d’importance pour l’agriculture de demain ? Et le vin dans tout ça trop sérieux, trop compliqué, trop cher ?

En attendant, bonne nuit les petits !

 

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