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20 juillet 2011 3 20 /07 /juillet /2011 16:31

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Longtemps dans les affres de l’indécision j’ai erré. Que vous dire sur le sujet qui n’ait déjà été dit. Allais-je vous faire vomir de rire à bas prix sur mon petit pays, raillant grassement ses travers du port d’Anvers au clocher d’Arlon ?

Peu élégant.

Oui, j’ai hésité à vous pondre un nouvel article de l’encyclopédie picrocholine. Et c’aurait été fort à point tant les querelles qui agitent notre pays sont sottes et vaines si on prend la peine d’y réfléchir un petit peu. Du rire fin, gras et salvateur à la fois. Mais peine m’en a pris parce que rien n’est sorti. Vous rendez-vous compte ? Je ne me sens pas capable de faire rire de mon petit pays. Probablement parce que ses éternelles gesticulations et autres sempiternelles ratiocinations ne me font plus rire. Plus rire du tout. Ils m’emmerdent ces tas de klettes patentées tournant en rond comme des cons dans une farandole depuis 400 jours.

 

 

Allais-je pour autant tomber dans le pathos ridicule d’un patriotisme larmoyant évoquant pêle-mêle les mânes des anciens combattants, les premiers Belges, le génie Mosan, la dentelle et les matins automnaux de Bruges, les chocolats Galler, Sandra Kim et Roger Jouret, alias l’ineffable king of the divan ? En passant, j’aurais pu écrire là un fameux sketch parce que faire se côtoyer dans la même phrase l’Art Mosan et Plastic Bertrand, à part pour l’amour d’une rime pauvre, ça frise le vertigineux quand même.

J’aurais pu vous conter moult historiettes fort édifiantes. Vous dire comment, alors que Louis XIV, dans toute sa démesure étatique si Française, s’employait vaillamment à porter la guerre, le sang et les larmes dans toute l’Europe, incendiant et bombardant au passage les plus beaux joyaux architecturaux de mon pays, alors que ce paradigme de l’absolutisme obtus et égocentrique faisait son Attila donc, le petit village de Mortroux, dans le Pays de Herve était en ébullition.

C’est que suite aux déprédations perpétrées par l’infâme soldatesque française, le village est ruiné. Le Mayeur et les échevins, suite à la consultation de la population et résistant aux plaintes courroucées des bourgeois, nantis et nobliaux, décident d’abord de renflouer et aider les petites gens, les pauvres, les démunis, les familles, et s’il reste de l’argent, on pensera alors aux plus riches qui de toute façon ne sont guère à plaindre. J’eus pu. Mais cela aurait-il suffit à vous expliquer la spécificité de mon pays par rapport à son grand voisin du sud ? Petit pays qui n’a jamais aimé les pouvoirs centraux forts et proches. Petit pays qui même s’il ne portait pas le même nom que maintenant existait bel et bien avant 1830 et n’est pas tout à fait une construction artificielle des grandes puissances. Petit pays, où, depuis la nuit des temps latins, se cotoyaient plus ou moins pacifiquement non pas deux mais une dizaine de langues au moins.

 

 

J’aurais pu aussi vous décrire le martyr de mon village natal, Barchon, quand le vindicatif Teuton à pointe l’envahit en 1914, le brula, massacra sa population, le dos collé au mur, une balle dans le crâne. J’aurais embrayé sur la lutte héroïque digne d’une série à la Spielberg des forts de Liège et de Namur, les boches qui avaient déclaré qu’on rentrait dans le Belge comme dans du beurre se heurtant à une muraille de feu, perdant une semaine et permettant à la Belgique et aux Français de terminer leurs mobilisations et manœuvres. Il parait même que cette résistance a valu à mon village et à d’autres d’avoir leur nom donné à une rue de Bruxelles et à une autre de Paris.

J’aurais pu plutôt vous dire combien je l’aime ce petit pays. Pas pour ses faits héroïques, ses sillons emplis du sang des simples sacrifiés aux rêves de démesure des grands enfoirés de l’histoire, non. Je l’aime pour ses gens simples et chaleureux, un peu cons et mous mais tellement truculents. Pour ses paysages vallonnés, ses immenses platitudes où rien n’arrête le regard sinon le ciel lourd chargé de nuages noirs qui viennent du nord.

 

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Ses rivières et ses canaux pudiques cachés derrière des voiles de peupliers. Ses forêts profondes et ses vergers riants. Ses bières si fameuses et délicieuses qui innovent chaque jour même si le fleuron brassicole belge est Brésilien et n’a cure de nos querelles linguistiques d’hyménoptères sociables sans ailes, sauf les mâles de temps en temps quand ils s’envolent pour copuler et là, ça emmerde ma voisine. Mais je me perds sur les sentiers de traverse. C’est quoi l’adjectif relatif à fourmi bordel ?

Edit : C'est myrmécéen, crétin des Alpes. 

Vous dire à quel point la nonchalance belge, je l’aime. Ses interminables et tarabiscotés compromis, ses crises qui contre toute attente finissent par un accord abracadabrant mais dans la paix et la sérénité molle d’un peuple qui se dit juste :

"ouf ti, on a voté, on se rassied et on boit notre chope, ces cons de politicards n’ont qu’à se débrouiller."

Comme j’aime mes concitoyens hâbleurs, toujours prêts à refaire le monde tant qu'ils sont attablés à une terrasse, si prompts à déverser leur verve poujadiste sur les politicards, oubliant illico que ce sont eux qui en votant les ont mis là.

Combien j’aime ce pays et ses régiolectes savoureux, ces gars du Limbourg venant bosser à Liège qui roulaient les R et parlaient un sabir exotique (le Limbourgeois) qui fait encore frémir aujourd’hui l’échine rêche et tordue des gros Flamingants bouffeurs de gaufres intégristes.

Mes Italiens d’Outremeuse, savoureux Minga-ti chirophones* sur l’éternel, mes potes marocains qui becquetaient des sandwiches au jambon avec un clin d’œil malicieux, mes Liégeois, Namurois, Tournaisiens, Bruxellois aux accents si divers et savoureux.

Combien j’aime le pays perdu de mon grand père, un pays de dimanches aux bouquètes et aux dringuelles de Matante Mareye et d’a Mononk Marcel qui me disaient :

 "Mî Vî pèté coyon, vochal vosse pitite dringuelle pô aller querî des mâles tchiques". Orthographe non garantie. En gros "Ma vieille couille éclatée, voilà un peu de sous pour aller chercher des mauvais bonbons". J’avais 5 ans.

 

 

Oui j’aurais pu vous le dire. Ou alors verser dans un humanisme égalitaire de bon aloi. Vous dire que les Flamands sont sympas, au fond, tout au fond. Que cette crise qui nous étouffe, c’est de la faute à tout le monde. Que nous les Francophones sommes coupables de ne pas apprendre plus le Néerlandais, que nos politiciens sont tous pourris et électoralistes, que les gauchistes c’est de la racaille, que nous portons la faute de nos ancêtres Fransquillons qui opprimèrent les pauvres Flamands.

Mais là non, je ne peux pas. Parce que c’est de la vaste connerie.

Le problème de mon pays est pourtant simple. Moi, Francophone, je ne peux rien y faire hormis râler. Je peux descendre dans la rue, manifester.

Autant, péter sur un violon pour faire du saxophone. Parce que tant que plus de 50 % de la population flamande de ce pays votera pour des partis porteurs de projets national-populistes (y compris le Zélé Haine V), tant que des milliers de ces gens descendront dans les rues pour acclamer le leader charismatique à la bouche lippue et au regard torve, le grand latiniste amoureux de son cul, rien ne bougera.

Asinus asinum fricat ? L’âne frotte l’âne, les imbéciles se congratulent dans la sérénité exquise de leur profonde inconscience acquise aux anathèmes foireux d’une frange fangeuse et vengeuse de politicards sans envergure.

Car en ce 21 juillet, plutôt que de vous faire rigoler, je voudrais gueuler un bon coup. Ca soulage. Comme Bébert Deux, mais en moins poli. Et en ne tirant pas sur l’ambulance des partis qui ne veulent pas faire de concession. Je crois qu’il faut donner des noms. J’admets volontiers que si les Francophones avaient fait preuve de vision politique à long terme, de courage, de jugeote, ils auraient envisagé dès les résolutions unilatérales du parlement flamand en 1999 de prendre le taureau par les cornes au lieu de se murer dans un attentisme qui n’a fait que radicaliser ceux d’en face.

Mais rêvons un peu…

Que se passerait-il si des crânes rasés chaussés de bottines (comique ça des crânes chaussés de bottines) défilaient dans les rues en gueulant :

"Les juifs dehors, crève Israël, rats de juifs !"

Ai-je besoin de vous le dire ?

Dès lors, pourquoi quand des crétins au regard éteint, regard évacué de la moindre étincelle d’humanité défilent en gueulant :

"Wallen Buiten, Belgie barst, Franstalige ratten, eruit", le centre pour l’égalité des chances ferme-t-il sa gueule ? Le Francophone n’est pas assez exotique à défendre ? Mais, me direz-vous, il ne s’agit là que des slogans d’une poignée de nationalistes haineux et cons.

Mais si aux portes de Onfleur on lisait un panneau payé par la municipalité disant "Onfleur, où les Français sont chez eux". Je pense que ça le ferait moyennement. Par contre "Dilbeek, waar Vlamingen THUIS zijn", c’est du sentiment national, monsieur. 

Mais que se passerait-il donc dans un pays normal, si chaque semaine ou presque, les membres d’un parti représentant une vingtaine de pourcents des votes sortait des phrases du genre "Les Noirs sont paresseux, ils ont une vraie culture du hamac" ou "les Marocains ne sont pas intellectuellement capables d’apprendre le Français" ou encore "les Algériens sont des assistés, des parasites, des chômeurs professionnels" ? 

Moi je pense que les tribunaux seraient bien garnis.

Pas en Belgique, tant que vous mettez Wallons ou Francophones dans l’étable des boucs-émissaires. Non, en Belgique, ça traduit seulement un sentiment profond et légitime de la population Flamande, brimée depuis les siècles des siècles, amen.

Que diraient les bons démocrates Européens si un pays, mettons la Turquie, mettait comme condition préalable de négociation avec l’Europe, la non signature de la convention cadre sur la protection des minorités ? Quand c’est la Flandre, c’est normal.

Ne souriez pas, voisins Français. Ce qui gangrène la Belgique par l’intermédiaire de sa majorité flamande, c’est ce qui vous guette, ce qui nous guette tous. La pensée facile, le repli sur soi, le triomphe des idées identitaires et simplistes qui désignent, une couleur de peau, une religion, une langue comme étant la source de vos problèmes. Parce que comme source, c’est plus facile à reconnaitre et à éradiquer que les mystérieux "spéculateurs" obéissant à leur nébuleuse loi du marché. Parce que l’Arabe de la maison à côté ou le Wallon du village en face, c’est plus commode de lui péter sa gueule qu’à l’actionnaire sans visage de Côte d’Or qui veut casser le coût de production des Mignonettes pour s’en foutre un peu plus dans les fouilles et veut donc délocaliser la production en Lituanie.

C’est une recette vieille comme le monde qui fait des petits en Europe : Danemark, Pays-Bas, Italie du Nord, Hongrie, et en France avec une Marine Le Pen plus alpine que marine dans les sondages, avec un racisme à la petite semaine suintant comme du pus par tous les trous de l’UMP.

 

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Et donc chers voisins flamingants (vous noterez, l’emploi de cet épithète à connotation politique, m’évitant ainsi de taper sur tout un peuple), imaginez-vous vraiment que la cause de vos prétendus malheurs, prétentieux nantis occidentaux, ce sont les Francophones qui vivraient à vos crochets ? La fermeture d’Opel, la délocalisation des chokotoff vers la Lituanie, la crise des subprimes, la fin prochaine de l’Euro, Lernout et Hauspie (hi hi coup bas), vous vous en sortiriez mieux, habitants d’un minuscule confetti enflé d’orgueil, sans le boulet Belgo-Francomou au pied ? Vous rendriez la racaille de Standard & Pools, sans âme et sans cœur, l’œil morne fixé sur des écrans inhumains alignant d’hideuses colonnes de chiffres, soudain plus humaine à la seule vertu des doux accords de la langue de Vondel ?

Bande de cons va ! Vous qui en êtes encore à vos ratiocinages perfides et passéistes sur les oppresseurs Francophones qui vous spolièrent au 19ème siècle.

Mais crétins congénitaux, ceux qui vous mettaient le nez dans la boue à cette époque, c’était des puissants : patrons, aristocrates, bourgeois. Francophones qu’ils soient d’Anvers ou de Liège, mais Flamands, Wallons ou Bruxellois. Des nantis qui avaient fait une révolution avec le sang du peuple et qui avaient confortablement installé une "démocratie" censitaire dans laquelle ni le paysan limbourgeois ni le populo carolo n’avaient le droit de vote. Nous étions dans le même sac, idiots !

Et maintenant, la plupart de ceux qui chaque jour s’enrichissent en tirant sur notre gentil pouvoir d’achat, ils parlent probablement Anglais. Allez-vous pour la cause envahir l’Angleterre ?

Et dans les tranchées, quand ils se prenaient un obus dans la gueule, vous croyez que les Wallons, Anglais, Français et même Allemands trouvaient leur mort moins sotte qu’un patriote Flamand ?

Et quand bien même mes ancêtres vous auraient amoindris, est-ce de ma faute à moi, celle de mes enfants peut-être ? Je suis responsable de MON passé pas de celui de mes parents, ni même des vôtres.

Vous n’assassinez pas la Belgique, vous faites le lit d’une Flandre suçant la Belgique jusqu’à la moelle. Une Belgique Flamande pour les Flamands. Les autres, marchez ou crevez. C’est ça qui vous botte. Avoir le beurre, l’argent du beurre et le cul de la crémière. La scission de la sécurité sociale mais pas des pensions. Rien que ça j’en ris.

Pauvres types qui a chaque élection mettez au pinacle non seulement les pires nationalistes identitaires mais aussi des gens d’une droite toute à droite, pour lesquels les méchants, les profiteurs, les parasites ce sont les pauvres, les chômeurs, les artistes, les ouvriers. Le Bien consistant évidemment à se lever tôt pour écraser la gueule des autres et se faire une max de blé. Lisez le programme de la NVA et vous verrez si je blague.

Et comme une bande de moutons bêlant vous applaudissez votre champion du Latin et de l’histoire à cinq balles, vous abreuvant de fierté nationale, de sentiments de supériorité infantile et des vieux clichés jaunis de votre sale nationalisme aux relents méphitiques de bruits de bottes et de pas de l’oie.

Putain ! Réveillez-vous ! Ecoutez ceux que votre Bart appelle les mauvais Flamands et qui sont de bons démocrates ! Réfléchissez, ça vous changera. Un jour, ce sera peut-être vous le mauvais Flamand !

Et méditez ceci… Une seule chanson du merveilleux groupe qu’est Laïs, jolies ondines de Kalmthout, fera bien plus pour la Flandre que tout ce que Bart De Wever pourra imposer. Une seule écoute de Doran ou de Dorothea me font trouver la Flandre plus belle que tous vos horribles drapeaux félins ne mettront jamais de couleur sur un étron.

 

 

J’aimais ce pays, mais il m’étouffe. Je n’en peux plus de le voir tourner comme un con de chien auquel on aurait cloué une patte. Je n’en peux plus d’entendre aboyer ce ramassis de nationalistes excités et qui n’ont que Flandre à la bouche. Je n’en peux plus des Francomous hébétés par tant de combativité. Avec à peine plus de conscience politique qu’une amibe dans une moule pas fraiche. Quand je lis les commentaires divers émis par des citoyens pourtant pas si cons et Francomous comme moi, ils en sont encore à faire du poujadisme de base et du droitisme de rigueur, fustigeant la Wallonie pourrie de socialisme, le fait qu’on ne devrait plus payer les politiciens, que le roi est bien malheureux monsieur, etc… Ils sont si peu à trembler comme moi devant la belle unanimité des faiseurs d’opinion, des politiques et de ceux qui votent pour eux au nord du pays. Un bloc infranchissable de haine, de rejet et d’incompréhension qui font du Francomou l’ennemi à abattre. Et de l’indépendance de la "Nation" Nationale-Populiste l’objectif ultime, l’appauvrissement de tous fut-il au bout du chemin.

 

 

Vraiment Belges, Belges… Je vous souhaite une bonne fête nationale, un bon défilé et tout. Moi, je cultiverai mon jardin.Je vais éteindre la télé et mon ordi. Je me servirai un Orval et puis une Westmalle Triple et j'écouterai Laïs, Arno et puis Les Gauff' et tant d'autres. 

Parce que les hymnes nationaux, même en reggae, ça m’a toujours fait gerber.

 

*Chirophone : qui parle avec les mains bien sûr !

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commentaires

A
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D
<br /> <br /> Marc, ton grand père ce n'est pas plutôt, "pti poyon" qu'il disait, ce qui veut dire petit poussin, quand même plus affectueux que couille éclatée.<br /> <br /> <br /> <br />
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L
<br /> <br /> Non non non, comme ma tante Marie : Vî pété coyon ! Mi ptit hopê (mon petit tas). Ptit poyon, c'était plus rare !<br /> <br /> <br /> Désolé pour l soirée chez Hugues. Je regrette mais réunion avec mon patron ce soir là. Il faut bien bosser parfois !<br /> <br /> <br /> <br />

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