L'essaim des Saints
C’est la Saint Romain, on m’avait pourtant dit que ça tombait le jour des calendres grecques. Ah mais non, ça, c’est la Sainte Mercédes. Saint Céréal, on en a fait tout un foin, pourtant ce n’était pas un tueur en série, juste un des nombreux martyrs du temps de Rome, période où on fauchait encore plus de chrétien qu’à l’époque de la faucille et du marteau. Que voulez-vous, à l’agraire comme à l’agraire.
Saint Pupule aussi, fut martyrisé au temps de la Rome antique, à ne pas confondre avec l’âge de la rime en toc qui est celui de votre serviteur. Mais bon, quand on ose se nommer Pupule, je vous le demande un peu, ne mérite-t-on pas le martyr ? Surtout quand c’est Pupule le soir dans le lointain (running gag qui tombe… à pic)
La Belgique tracassière et ubuesque.
Je me dois de tout avouer. Je suis coupable. La crise belge je veux dire. Je suis coupable. C’est moi.
Bon, je ne suis peut-être pas le seul fautif, certes. Mais j’ai une part de responsabilité dans ce qui arrive à mon pays. Je connais environ 10 millions d’autres coupables. A divers degrés.
Si la culpabilité des nationalistes flamingants qui ont réussi à infuser tous les partis, les medias et les milieux au Nord est écrasante, si la culpabilité du cartel mou francophone est très pesante, il est indéniable que je dois assumer ma part de responsabilité.
Ma mère est Hollandaise. Enfin pas tout à fait, elle est de Maastricht. C’est donc une Limbourgeoise mon bon monsieur. Comme le racontait son père, à Maastricht on sait reconnaître un Hollandais quand on en croise un. D’abord, il chuinte tellement qu’on ne comprend rien et puis quand ils sont trois, dans les bistrots, ils prennent un coca et trois pailles. Donc ma mère n’est pas Hollandaise mais Néerlandaise, du Limbourg. Bref, n’ergotons pas : c’est une Flamande !
Et moi, je suis un parfait unilingue. Probablement, comme le disait si bien Yves Leterme, ne suis-je pas intellectuellement capable d’apprendre cette langue. C’est à peu près ça. Enfin, à peu près.
Ma mère ne m’a jamais appris le néerlandais. Elle, son mari (mon père pour ceux qui ne suivraient pas), ses beaux-parents n’y tenaient pas. Sinon, c’est sûr, j’allais mélanger les deux, n’être bon dans aucune langue. Alors on ne m’a appris que le français.
A l’école, quand j’ai eu le choix d’apprendre une deuxième langue, j’ai pris l’anglais. Parce que c’était la langue de l’avenir, mon bon monsieur. J’ai pris néerlandais comme troisième langue. Avec deux heures par semaine et les mêmes sempiternelles listes de vocabulaire et de verbes irréguliers à longueur d’année, nous diront que ma motivation à l’apprentissage fut assez moyenne, pour ne pas dire médiane.
Vous me direz qu’en anglais, avec 4 heures et très peu de conversations en classe, ce n’était pas beaucoup mieux. Mais l’anglais au moins, on l’entendait à la radio. Hey man, les gun’s y gueulaient en anglais d’abord ! Enfin un sabir approchant. Mais le néerlandais, une fois sorti de la classe… Pfuittt, n’avait plus.
Pensez donc, en Belgique, nous n’avons pas de chaîne nationale multilingue. Nous ne connaissons que très mal les artistes de l’autre côté de la frontière. Il n’y a rien de bilingue, nulle part, sauf à Bruxelles. Mais bon, une langue si tu ne plonges pas dedans, si tu ne pratiques pas, ça reste lettre morte. Et comme nous sommes pour la plupart des pourris fainéants bien à l’aise parmi les nôtres… On ne va pas voir ailleurs s’il faut trop fouiller. Et donc MTV plutôt que VTM si vous voulez…
Et du coup… Vous connaissez le principe de dérive génétique ? Prenez une population animale, isolez en une partie. Laissez faire le temps et vous obtiendrez deux espèces différentes. Et ce même si la population de départ était homogène. Et c’est ce qui est arrivé à mon pays. Nous avions deux langues différentes. Maintenant, nous avons aussi des cultures, des idéaux, des idoles, des politiciens, des medias différents. Et aucune, aucune plate-forme commune où nous pouvons échanger. Je ne sais pas si nous sommes déjà deux espèces différentes. Il faudrait que je me reproduise avec une Flamande pour le vérifier. Mon éducation scientifique n’est pas formellement contre. Ma femme beaucoup plus.
Prenez une marge d’extrémistes comme il y en a partout, une culture longtemps maltraitée comme il y en a partout, un peuple pas très fier et encore groggy de sa déchéance économique, comme il y en a partout aussi. Agitez chacun dans son bocal, et vous obtenez la situation actuelle de la Belgique.
Cela fait des décennies qu’on nous prépare cette situation. Quand on scinde la télé, la radio, les circonscriptions électorales, les partis politiques, la culture… bref tout ce qui fait l’opinion et l’âme d’un peuple, on ne peut rien obtenir d’autre. Et nous sommes tous coupables.
Tous.
Coupables.
D’avoir dit un jour en écoutant une info « môssis flaminds va », de toujours voter comme des veaux pour le gars qu'a une bonne tête à la télé, d’écouter aveuglément les journaux écrits ou parlés, d’aller à la côte sans jamais même prétendre à un petit "danke u", de rentrer dans un magasin de Bruges en disant d’emblée "Bonjour monsieur" , de fermer nos gueules quand il faudrait l'ouvrir, même après plus de 250 jours de parfait surplace de nos politiciens, qui décidément nous prennent pour des cons, de nous convaincre que le communautaire, ce n’était pas le vrai problème des gens…
Nous avons laissé faire. Et maintenant, nous allons recevoir la monnaie de notre pièce.
On s'en fout de toute façon. Demain, lâchement mais dans le silence feutré des renoncements hypocrites, mars... ne passera pas l'hiver !
Que fait le gouvernement ?